Charlotte Girard : « J’aime être au service du jeu »
#LesIndispensables - 19 avril 2017
#LesIndispensables. Ils ne jouent pas, mais sans eux, il manquerait quelque chose… Ce sont les indispensables du sport angevin ! A l’approche des championnats du monde de hockey-sur-glace, qui se dérouleront à Paris du 5 au 18 mai, rencontre avec Charlotte Girard, 35 ans, l’une des 6 femmes sur les 120 arbitres de hockey en France, licenciée à Angers depuis une quinzaine d’années. Juge de ligne en Ligue Magnus et au niveau international, la jeune femme a appris à se faire respecter sur la glace.
Par Charles Dubré-Beduneau
Crédit photo principale : Stéphane Eude
On a parfois du mal à comprendre leurs décisions, et, dans le feu de l’action, sont (trop) souvent la cible de notre frustration. Mais ils sont toujours mieux placés que nous pour juger une action de jeu en une fraction de secondes… et on ne pourrait pas jouer sans eux. On oublie vite qu’au hockey-sur-glace comme sur la plupart des terrains, sans arbitres, pas de match. Malheureusement, les vocations sont rares, encore plus chez les femmes. Le parcours de Charlotte Girard est donc d’autant plus méritant. D’abord arbitre UNSS dans différents sports dès l’âge de 11 ans puis joueuse de hockey à Angers pendant de longues années, elle choisit définitivement il y a 14 ans le maillot zébré pour continuer à patiner au plus haut niveau et ne jamais être « hors-jeu ».
Aujourd’hui, non satisfaite d’officier en tant que juge de ligne en Ligue Magnus, elle arbitre également régulièrement des rencontres féminines internationales et a même été sélectionnée pour participer aux Jeux Olympiques de Sotchi en 2014. De loin le meilleur souvenir de sa carrière. « C’est le Graal pour tout sportif. C’est un honneur et une grande fierté : on représente sa nation au plus haut niveau. C’est beaucoup de travail, quinze ans de sport de haut niveau. C’est énorme ! », se réjouit-elle encore aujourd’hui. Charlotte a été seulement le 6e arbitre français à participer aux JO depuis Albertville en 1992.
« On a l’arbitrage que l’on mérite ! »
À raison d’une soixantaine de matchs par saison, la jeune femme a arbitré entre 800 et 900 matchs dans sa carrière. « Tout au long de la saison, on se prépare beaucoup. On nous demande d’avoir la même condition physique que les joueurs, cela veut dire des entraînements réguliers en salle de sport. Je fais appel à un préparateur physique pour les grandes échéances. Sinon je fais du handball en pre-nationale (au Chambray Touraine Handball) à côté : trois entraînements par semaine, plus un match ». Face aux critiques formulées par certains joueurs et coachs de Ligue Magnus sur le niveau de l’arbitrage en France, elle est catégorique : « On a l’arbitre que l’on mérite ! Ne nous imaginons pas que les arbitres de Magnus sont en dessous du niveau des équipes. Simplement, le défaut de soutien et de protection de la part de notre hiérarchie ouvre une porte à la pression des coachs et à la critique des clubs ».
Crédit photo Sébastien Aubinaud / Ouest-France
Si le rôle d’arbitre est parfois ingrat, ce qui motive Charlotte par dessus tout est « d’être au service du jeu en étant perpétuellement en quête d’excellence. Il faut être attentif au moindre détail. Au hockey féminin les charges sont interdites, c’est beaucoup plus technique, avec plus de passes, donc c’est une lecture de jeu un peu différente. C’est plus fluide et c’est très sympa à arbitrer ». Mais même sans charges, Charlotte et ses collègues sont moins protégées que les joueurs et donc encore plus exposés aux coups de crosse involontaires ou à un palet dévié. « Il faut être hyper vigilant. J’ai été blessé à plusieurs reprises, heureusement jamais gravement », confie-t-elle.
Un fragile équilibre entre autorité naturelle, humilité et sang-froid
Arbitrer le sport collectif le plus rapide du monde au très haut niveau national et mondial n’est pas donné à tout le monde et requiert certaines qualités. « Le sang-froid s’acquiert avec l’expérience mais il faut une certaine autorité naturelle et une bonne dose d’humilité », explique-t-elle. Reconnue pour ses compétences et son professionnalisme, elle a appris à se faire respecter sur la glace, par les femmes comme par les hommes. « Quand j’étais jeune arbitre, un coach m’a dit « Retourne faire la vaisselle et du tricot », ce qui ne m’a pas empêché de le suspendre. À partir de là, je n’ai plus eu tellement de problèmes avec les coachs ou les joueurs ». Malheureusement, à mesure que son palmarès international s’étoffe, elle est confrontée à de plus en plus de misogynie de la part ses propres collègues masculins.
Après les JO de Sotchi, PyeongChang?
De nouveau en lice pour participer aux Jeux Olympiques 2018 en Corée du Sud, Charlotte redouble d’efforts pour être du voyage, avec un objectif en tête : arbitrer la finale olympique, le seul grand match qui manque à son palmarès. Avec la dalle et la détermination dont elle fait preuve chaque jour sur et en dehors de la glace, on ne voit pas ce qui pourrait l’en empêcher !