« Au football américain, le coach est autant acteur que ses joueurs »
#LesIndispensables - 16 octobre 2018
#ParolesDeCoach. Entre la connaissance pointue de sa discipline, la planification d’un projet global, ou l’indispensable gestion humaine et émotionnelle – sans compter les innombrables décisions à prendre pour tenter d’influencer (positivement !) le cours des choses – l’entraîneur est bien souvent un être fascinant à observer, toujours passionnant à écouter. Ses mots sont cruciaux, car à la base de son action, à savoir faire passer des messages. Pour ce nouvel épisode, nous sommes allés à la rencontre de Nelson Bernardes, entraîneur en chef de l’équipe senior des Yankees SCO Football Américain et responsable du développement sportif du club. Il détaille les spécificités du football américain et les exigences qui vont avec.
Propos recueillis par Charles Dubré-Beduneau
Staff étoffé autour de l’équipe senior: « Mieux connaître nos joueurs »
« L’an dernier j’étais tout seul pour coacher l’équipe senior, c’était difficile de tout gérer et on a vécu une saison compliquée. Cette année l’organisation s’améliore puisque Damien Ferrante (responsable U16), Alexandre Aubert (coordinateur défensif et responsable des U19), William Benaïssa et Loan Martin viennent m’épauler. Il faut savoir qu’au football américain chaque poste est très spécifique et idéalement il faudrait un coach par poste. Une équipe se compose au minimum d’une trentaine de joueurs mais ça peut monter jusqu’à 45… Il est important d’avoir un staff suffisamment nombreux pour garder une proximité joueur-entraîneur. Mieux on connaît nos joueurs, plus c’est facile de les aider à atteindre leur meilleur niveau ou de comprendre pourquoi ils n’ont pas fait un bon entraînement ou un bon match. Ça sera aussi agréable de pourvoir échanger et confronter mes ressentis avec mes assistants. D’ailleurs, j’en profite pour lancer un appel à volontaire: nous cherchons un passionné pour venir recueillir des statistiques lors de nos matchs. »
« De l’extérieur le public ne s’en rend pas forcément compte mais cela demande beaucoup de rigueur et de discipline, à la fois physique mais aussi psychologique. Le football américain laisse peu de place à l’improvisation »
Préparation physique et tactique: « Le football américain exige une grande discipline »
« La saison de football américain est courte (de janvier à mars puis les playoffs au printemps) mais nécessite beaucoup de préparation physique, technique et tactique. Nous organisons un camp de pré-saison en novembre et nous demandons un gros investissement à tous les joueurs. En match, les phases de jeu sont courtes mais intenses. Les gestes ne sont pas innés, surtout pour nous Français, donc il faut les répéter encore et encore. Nos systèmes de jeu sont moins complexes et moins nombreux qu’aux États-Unis mais il est essentiel que les joueurs soient bien concentrés et maîtres de leurs émotions pour les exécuter correctement. De l’extérieur, le public ne s’en rend pas forcément compte mais cela demande beaucoup de rigueur et de discipline, à la fois physique mais aussi psychologique. Le football américain laisse peu de place à l’improvisation. J’utilise beaucoup la vidéo, car l’image ne ment jamais et est souvent plus parlante que des longs discours. Cela étant dit, il faut aussi parfois savoir ménager les joueurs et relâcher la pression pour que ça reste un plaisir et non pas que des contraintes. »
« Il faut avoir envie de faire l’effort pour l’autre, être prêt à faire le travail de l’ombre qui va permettre à l’équipe de briller. Ce sens du sacrifice est très fort au football américain mais c’est ce qui fait que l’on partage des émotions aussi belles au sein du groupe »
Les valeurs du football américain: « Le sens du collectif, de l’effort et du sacrifice »
« Dans notre sport, le sens du collectif est essentiel. Chaque joueur a un rôle bien défini et se met au service de l’équipe. Certains sont moins dans la lumière que d’autres mais leur rôle est tout aussi essentiel. Chacun contribue à sa manière. Il faut avoir envie de faire l’effort pour l’autre, être prêt à faire le travail de l’ombre qui va permettre à l’équipe de briller. Ce sens du sacrifice est très fort au football américain mais c’est ce qui fait que l’on partage des émotions aussi belles au sein du groupe. C’est ce que j’essaie de transmettre et de rappeler parfois. Le groupe prime sur les individus. Un peu comme le rugby, c’est un sport de contact mais où il règne un vrai esprit de fraternité. »
Le rôle du coach: « On peut changer le cours d’un match »
« Ce que j’aime en tant que coach au football américain c’est de pouvoir être acteur à part entière dans un match, au même titre que mes joueurs. C’est moi qui décide comment on va aborder chaque action, chaque phase de jeu. Je ne peux évidemment pas prévoir tout ce qui se passe ensuite sur le terrain (une perte de balle, une interception…) mais d’une action à l’autre, j’ai la possibilité de changer le cours du match. Le fait de réussir à redonner confiance à un joueur entre deux actions est aussi un aspect que j’apprécie beaucoup. Au final, ce sont bien sûr les joueurs qui font le boulot sur le terrain, mais c’est génial d’avoir un impact aussi direct dans le jeu. »