Le monocycle ou l’apprentissage de la liberté
#Découverte - 01 mars 2022
#Découverte. La Dalle Angevine vous fait aussi découvrir des pratiques émergentes qui sont en train de trouver leur place dans la ville… Lundi soir, nous étions autour de l’IceParc pour rencontrer une nouvelle association sportive, « D’Angers Monocycle ». Reportage.
Texte : Valentin Deudon
Photos : Franck Potvin
Même si l’IceParc et son vaste parvis extérieur ne figurent pas sur votre trajet le lundi en fin d’après-midi, on vous conseille vivement le détour… Car chaque premier jour de la semaine entre 18 et 20 heures, vous pourrez y croiser de curieux engins à roue unique qui déambulent joyeusement sur le bitume. Dessus, des passionnées et des passionnés de tous les âges, les instables débutants cohabitant avec quelques spécialistes de l’équilibre, tous épris d’une forme de liberté que rien d’autre ne leur procure. Le genre de liberté à rendre carrément jaloux ceux qui leur rendent visite sans oser tenter l’expérience… Cette expérience singulière qu’il ne faut surtout plus s’interdire, c’est celle du monocycle, rendue possible et accessible grâce à une association nouvellement venue dans le paysage du sport angevin.
«D’Angers Monocycle», alias DAMO, a en effet été créée en août dernier à l’initiative de Julien Sourisseau, 39 ans, professeur d’EPS à Brissac et ancien joueur de niveau national en tennis de table : «Enfant, j’ai toujours été fasciné par cet objet, mais dans ma tête ce n’était pas pour moi. Puis à la faveur d’une rencontre, j’ai eu envie de m’y mettre. Je suis devenu un fou de mono !»
L’envie de ne plus le pratiquer en solo, de partager cette affection débordante, et d’engager une petite communauté sur Angers, tout cela a convaincu le natif de Cholet de fonder un club, un logo et surtout un état d’esprit : «Je souhaitais d’abord proposer un lieu pour se retrouver, entre personnes bienveillantes partageant les mêmes valeurs, un endroit où chacun puisse se sentir bien et laisser derrière lui sa journée. Bien sûr, je leur apprends aussi à rouler, avec la volonté de déconstruire l’idée du monocycle uniquement comme outil de cirque. Non, c’est aussi un moyen de déplacement qui peut être fun, nouveau, très libre».
Vingt-cinq adhérents après cinq mois d’existence de l’association
Et l’enthousiasme comme la générosité du fondateur semblent porter leurs fruits, puisque DAMO réunit aujourd’hui 25 adhérents qui adorent se retrouver chaque lundi ou presque. On croise d’abord Stéphanie, qui a «réussi le pari de tenir dessus», avant d’emmener pour la première fois ses deux fils, casques et coudières bien accrochés. Plusieurs parents viennent ainsi passer un moment privilégié avec leur enfant, comme Noémie et Oscar. «C’est mon défi de maman !», explique Sylvie devant une de ses filles déjà habile sur son appareil, elle qui travaille même une chorégraphie avec le coach Julien. «Il existe une multitude de pratiques : balade, freestyle, trial, flat… Chacun peut y trouver son compte et son plaisir», précise ce dernier. Pierre-Yves a lui ressorti de la cave le vieux et beau mono sur lequel il montait il y a 30 ans ! De sa rampe de lancement, récupérant d’un effort récent et observant Mathis, 17 ans, il revoit peut-être défiler ses jeunes années… Mathis qui s’entraîne à faire du surplace, et qui aimerait aussi «tenter la marche arrière, mais ce sera pour plus tard !»
“Je suis impressionné de voir comment chacun progresse, ils ont envie de réussir”
Chacun évolue à sa manière, à son rythme, à sa joie. Des mini-groupes de discussions se forment. Julien veut rester proche, disponible, «comme ressource pour apporter un conseil si besoin». Animer aussi parfois la bande par de petits défis. Quatre jeunes font ainsi le tour de la patinoire, chronométrés pour un concours de vitesse. Mais dans ce sport, il existe aussi des concours de lenteur, ce qui est loin d’être plus simple…
Pendant ce temps, Florian travaille avec application ses montées sur le mono, un geste qu’il affectionne, avant de faire une pause pour lâcher lui aussi ce doux mot de «liberté», décrivant ainsi la sensation éprouvée sur sa selle. Derrière lui, deux monocycles s’éloignent dans le soleil couchant, leurs propriétaires main dans la main. Car quand on ne maîtrise pas encore bien l’équilibre, il est bon de pouvoir compter sur l’autre pour se rassurer, se soutenir. Bref, on y arrive mieux à deux que tout seul et cela ne vaut pas que pour le monocycle.
Julien Sourisseau observe avec le sourire son petit monde et théorise sur la mécanique de son jeu favori : «On apprend des façons de monter, de descendre, de se mettre en sécurité, en essayant de comprendre comment ça fonctionne. C’est une roue fixe donc si tu ne pédales pas, ça n’avance pas. En réalité il y a tout un laisser-faire, il faut laisser la roue agir et bien s’asseoir sur la selle. Le débutant se soulève légèrement de sa selle et se crispe sur les pédales. Je suis vraiment impressionné de voir comment chacun progresse en remontant sans cesse, comment ils ont envie de réussir». Julien a réussi son pari, il n’est plus le seul «malade» de monocycle à Angers, il a construit une force vive autour de lui. Et imagine déjà le futur de la structure : «On aimerait bien avoir une salle pour l’hiver, organiser des événements quand tout le monde saura bien rouler, des pique-niques et une course d’orientation notamment. On a plein d’idées, ce n’est que le début !»