Falone Pégé, les Jeux des Transplantés au bout du tunnel
#Découverte - 18 janvier 2023
Toutes les vies méritent d’être racontées. Elles ont chacune leurs beautés, leurs obstacles, leur trajectoire. Celle empruntée par Falone Pégé est déjà singulière. A 23 ans, la jeune femme se prépare à s’envoler en Australie pour participer aux Jeux Mondiaux des personnes Transplantées.
Texte : Thomas Charrier
Photos : Franck Potvin
Lundi 19 décembre 2022, Falone Pégé emprunte le chemin qui mène au city stade d’Andigné, ballon de basket en mains. Franck, notre photographe prend le même itinéraire. A l’instant même où ils se rencontrent, leurs voix résonnent déjà dans la grisaille lionnaise. C’est ici, sur ce terrain situé entre le Lion d’Angers et Segré, qu’elle a ses repères. Au milieu d’un champ peuplé de vaches et d’une aire de jeux pour enfants. L’endroit se prête parfaitement à une séance photos improvisée. Falone « n’est pas très à l’aise au début » mais elle se prend au jeu. avant que la jeune femme ne se livre à cœur ouvert pendant une heure.
Quelques jours plus tôt, Falone était à Grenoble où elle a effectué un stage dans le cadre de ses études. La jeune femme suit un BTS prothésiste-orthésiste au Lycée Mongazon à Angers, qu’elle a intégré à la rentrée de septembre 2022. Une première expérience « très intéressante avec une équipe top » au sein d’une société spécialisée dans la réalisation d’appareillages orthopédiques des quatre membres. L’entreprise réalise notamment des orthèses ou des prothèses utiles à la pratique du sport… Le sport et la santé, deux domaines centraux dans l’histoire de Falone, qui se souvient mieux que personne de la date du premier jour de confinement : le mardi 16 mars 2020.
« Ce n’est pas parce qu’on est jeune qu’il ne peut rien nous arriver »
Les maux de ventre qui la font souffrir depuis deux jours s’intensifient, Falone « ne tient plus debout ». Un médecin l’oriente vers le CHU en urgence. S’en suit une batterie d’examens, puis l’isolement. Quand tout le monde doit rester chez soi, elle est admise dans une chambre d’hôpital et « suit le mouvement sans trop comprendre ». Jusqu’à la réalisation d’un myélogramme, pour analyser des cellules de moelle osseuse, puis une admission au service dédié aux maladies du sang pour une nuit en chambre stérile. Là, le diagnostic tombe : Falone doit se battre contre une leucémie, un cancer du sang.
Heureusement, elle n’est pas seule, son papa est à ses côtés. Un soutien plus qu’important pour la jeune femme, alors âgée de 20 ans. La maladie est à un stade avancé et le traitement doit démarrer immédiatement. De scanners en chimiothérapies, l’étudiante commence à accepter la maladie le jour où elle s’autorise « à dessiner en mettant la musique à fond dans la chambre d’hôpital ». Dans le cadre de son suivi médical, elle accepte de discuter avec une psychologue. Cette aide lui « a fait du bien, car elle a pu préparer la sortie de l’hôpital, la vie quotidienne… Et même si je me fichais d’être chauve, nous avons abordé tous ces sujets que l’entourage ou les médecins éviteront peut-être d’évoquer ».
Le premier traitement est le bon, il a duré un mois et demi. Falone est en rémission ! A sa sortie de l’hôpital, elle ne veut surtout pas se cacher : « Il y a ceux qui posent des questions, et ceux qui fuient le regard… Mais c’est comme ça, cela existe, pourquoi le cacher? Au contraire, ce n’est pas parce qu’on est jeune qu’il ne peut rien nous arriver ».
« Le mental fait beaucoup face à la maladie ! »
A ce stade de son combat, Falone aperçoit le bout du tunnel. Elle a une décision à prendre, et pas des moindres. Les médecins lui parlent de greffe. « J’ai tout de suite accepté, pour limiter le risque de rechute », se souvient-elle. C’est un processus long, avec « énormément de rendez-vous en amont ». La greffe « est similaire à une transfusion sanguine. Ce n’est pas une opération ». Ensuite, l’isolement pendant trois semaines. Enfin, un protocole à la maison : trois mois de confinement « pendant lesquels tu ne peux rien faire. Je faisais des nuits de douze heures. Le plus dur, c’est le régime alimentaire strict. Il faut changer toutes les habitudes et être extrêmement vigilant ». Une autre période délicate que Falone doit gérer en prenant son mal en patience. Il faut dire que « rester enfermée n’est pas [s]a tasse de thé ». Elle a hâte de pouvoir refaire du sport « pour se vider la tête » !
Mais la perte d’endurance est un des effets de la greffe. Elle ne pourra donc pas reprendre l’activité physique avec la même intensité qu’avant, elle qui a joué en Départementale 1 de basket sous les couleurs d l’ESSHA Basket à Segré. Alors elle s’y remet « petit à petit avec la marche. Mais après 500 mètres, j’étais ko. C’était très, très frustrant » pour celle qui préfère s’adonner à des exercices qui entraînent l’augmentation du rythme cardiaque, sans quoi elle a « l’impression de ne pas être fatiguée à la fin… Enfin je ne sais pas comment dire, mais… » souffle-t-elle dans un éclat de rire. Elle est comme cela, Falone. Elle a le goût de l’effort et assure que « le mental fait beaucoup face à la maladie ! Si tu ne l’as pas, tu t’effondres ». Il est aussi un précieux allié dans sa préparation à son prochain grand rendez-vous, à Perth, en Australie : les Jeux Mondiaux des personnes Transplantées.
Porte-parole pour sensibiliser à la greffe et au don de moelle osseuse
Lors de sa prise en charge à l’hôpital, les médecins de Falone lui apprennent l’existence de compétitions sportives destinées aux personnes ayant reçu une transplantation. Ils l’encouragent à contacter Trans-Forme, qui organise des Jeux Nationaux pour s’y inscrire. Immédiatement, elle remplit un dossier médical et patiente un an après sa greffe, comme le stipule le règlement. C’est ainsi qu’elle prend part à l’édition 2022 à Narbonne. Sur place, Falone observe vite que « beaucoup d’athlètes se connaissent depuis qu’ils sont tous petits, leurs parents aussi car ils les suivent chaque année. C’est comme une famille ».
Cette participation lui ouvre les portes des Jeux Mondiaux, organisés par la World Transplant Games, du 13 au 23 avril à Perth, en Australie. Falone y défendra les couleurs de l’Équipe de France sur quatre épreuves : le basket 3×3, le 3 kilomètres marche et les 100 et 200 mètres nage libre. Elle se réjouit de pouvoir faire « des rencontres avec des gens du monde entier, des personnes qui, comme nous, sont transplantées ». Au-delà des objectifs sportifs qu’elle se fixe car « cela reste une compétition », Falone souhaite par-dessus tout « promouvoir le don d’organe, sensibiliser, en parler et montrer que la greffe fonctionne ». Car elle le sait : « Dans tout ce malheur, j’ai eu la chance de trouver très vite un donneur polonais. Je le remercierai éternellement de m’avoir sauvé la vie ! Le don de moelle osseuse se fait de son vivant, et c’est important d’y penser ».
Instagram et cagnotte en ligne
Falone a ouvert une cagnotte en ligne pour l’aider dans l’organisation de son départ à Perth et la participation à la compétition. Pour participer, c’est ici : Falone Pégé aux Jeux Mondiaux des Transplantés 2023. Et pour suivre l’événement, rendez-vous sur Instagram : @falone.transplantgames25.08