Ma Dalle Intime par Stéphan Gauthier
#MaDalleIntime - 25 janvier 2023
#MaDalleIntime. 10 questions, 10 sillons à creuser pour interroger en profondeur la manière de vivre le sport de nos athlètes locaux. Pour réveiller aussi leurs souvenirs, identifier les moments décisifs, partager leurs sources de motivation… Une dalle angevine, une dalle intime que nous confie le basketteur de l’EAB Stéphan Gauthier, 27 ans, qui vit sa quatrième saison à Angers, en plus d’être un spécialiste du 3×3 lors des compétitions estivales. Interview.
Texte : Valentin Deudon
Photos : Etoile Angers Basket
1- Pourquoi aimes-tu tant ton sport, qu’est-ce qui te plait en lui? Parles-nous de ton plaisir à le pratiquer.
Je l’aime pour plusieurs raisons. La débauche d’énergie d’abord, car les efforts demandés sont constants, en défense comme en attaque. Ses aspects tactiques ensuite qui m’intéressent et peuvent changer le cours d’un match. Et puis sa dimension émotionnelle, mentale. Il faut être fort car on essuie beaucoup d’échecs. Il faut parvenir à switcher et à rester toujours positif.
2- Un moment fondateur, décisif, qui a déclenché cet amour pour le basket, ce besoin d’en faire un métier?
Le basket est un sport familial chez nous, j’ai grandi avec. J’allais voir jouer mon père et ma mère, mes grands-parents ont même été à l’origine d’un club. C’est un environnement naturel pour moi, ça a toujours été une passion. Quant à en faire un métier, j’ai commencé à avoir cet espoir en entrant en centre de formation, vers les U15, à Boulazac, un club avec une grosse ferveur, une salle de 5000 places qui donne très envie quand on est jeune joueur…
3- Quel personnage de ton environnement proche a été fondamental dans ton éducation sportive?
Ma famille déjà, qui a toujours été là pour me conseiller et m’aider dans mes choix. Je pense aussi à Pierre Davenel, un éducateur que j’ai connu en jeunes à Bergerac. Il m’a surclassé vers 13 ans et j’ai beaucoup progressé grâce à ça. Thomas Andrieux également, mon coach tout au long de mon cursus de formation. Il a important dans mon développement basket mais aussi humain. Et puis en arrivant dans le monde pro, c’est Claude Bergeaud, ancien sélectionneur de l’équipe de France, qui m’a lancé et fait confiance quand il a repris Boulazac en 2017.
4- Où et comment puises-tu ta motivation, comment tu la régénères dans les périodes difficiles?
J’ai connu une grosse blessure au genou au début de ma carrière, à 21 ans, lorsque j’étais en Pro A. Elle m’a éloigné des terrains pendant presque un an… J’ai mis beaucoup de temps à revenir, j’ai dû beaucoup bosser et ça a été très compliqué mentalement. La seule source de motivation que je ressentais alors, c’était le terrain : rejouer enfin, revenir sur le parquet, retrouver la compétition qui me manquait. Depuis cet épisode, ma carrière me semble plus facile. Je me répète que j’ai énormément de chance de jouer. Ce que j’ai vécu m’aide à chasser plus vite les doutes.
5- Un mal de ton sport que tu aimerais voir disparaitre, un espoir de changement pour son avenir?
Je dirais les statistiques, qui me semblent dommageables. Il y en aura toujours, mais un match de basket, ce ne sont pas que des stats, il y a aussi tous les efforts qu’on ne peut pas mesurer. Le problème, c’est qu’en leur accordant trop d’importance, joueurs, coachs et supporters, on peut transformer le jeu. La nouvelle génération est impactée par ça à mon sens, certains peuvent jouer pour leurs stats personnelles plus que pour le collectif… Et ça se voit. Ca n’est pas l’esprit du basket que j’aime et défends.
6- Une création autour de ton sport (série, film, docu, livre, BD, spectacle, œuvre…) qui t’a marqué?
La biographie de Kobe Bryant, publiée avant son décès. Je ne lis quasiment jamais, mais ce livre a été important. Il était mon idole étant jeune et j’ai acheté sa bio pendant ma longue blessure. Il a connu lui aussi son lot de coups durs et explique comment s’en sortir. Il a toujours encore plus performé après ses blessures, c’est impressionnant. Sa mentalité m’a beaucoup inspiré, sa rage de vaincre, tout le travail qu’il a accompli pour réussir.
7- Un ou une athlète de haut niveau actuel ou historique auquel tu aimes te référer, et pourquoi?
Dans le basket, Kobe Bryant dont je viens de parler. Mais aussi Dewarick Spencer, un Américain qui a joué en France et que j’adorais pour son élégance sur le terrain. Il figurait dans mon équipe de cœur à l’époque et j’allais même parfois le voir en vrai à Roanne où mes parents avaient des amis. Hors basket, Novak Djokovic, pour sa force mentale au-dessus de la moyenne. Sa capacité à renverser le cours d’un match par tous les moyens, y compris grâce à sa fourberie, je trouve ça incroyable… C’est un génie !
8- La dernière fois que tu as pleuré, de peine ou de joie, par le sport? Peux-tu nous expliquer cette émotion.
Je ne pleure jamais mais j’ai le souvenir d’une émotion très forte, des larmes inattendues, pendant ma longue blessure, vers la fin. C’est arrivé lors d’un avant-match au Pailo à Boulazac, pendant la présentation des équipes, dans une ambiance incroyable… J’étais en civil sur le banc et je me suis effondré. Je suis parti aux toilettes et j’ai pleuré seul pendant dix minutes. C’était bizarre, émouvant aussi de me rendre compte que ça m’impactait autant de na pas pouvoir jouer et que mon corps a eu besoin de lâcher ça sans que je puisse le maîtriser.
J’ai envie de parler d’une émotion forte positive également, une sensation incroyable, aux championnats du monde 3×3 universitaire avec l’équipe de France, au Brésil en 2013. C’était ma première compétition dans cette discipline, après un gros match, une demi-finale que l’on gagne sur un dernier shoot d’un coéquipier. C’était fou, j’allais jouer la finale, je n’arrivais pas à réaliser… Je me rappelle avoir crié pendant au moins une minute ! J’ai senti une joie que je n’avais jamais ressenti avant et que j’ai du mal à retrouver depuis.
9- Un autre sport passionnant, que tu aurais aimé pratiquer, que tu pratiques aussi peut-être?
Le tennis. Il me manque l’aspect collectif mais excepté ça, il regroupe un peu tout ce que j’aime. C’est un sport qui révèle encore plus que d’autres l’importance du mental. J’essaie d’y jouer l’été avec des amis. Niveau sports co, j’ai fait du football étant jeune et ce sport continue à me plaire.
10- Un lieu important, un décor puissant dans ton histoire avec ton sport, dans lequel tu te sens bien?
L’Agora, le nom de la salle d’entraînement des pros à Boulazac, qui est aussi celle du centre de formation. J’ai passé là-bas neuf ans de ma vie, j’y ai tellement joué… J’ai vécu tant de moments et d’émotions dans ce lieu que j’ai l’impression d’en connaitre chaque recoin !
Stéphan Gauthier, numéro 10 et capitaine d'une EAB promue en Pro B cette saison