Elite d’athlétisme: des records dans la ferveur angevine
#JourDeMatch - 02 juillet 2024
Ce week-end, le stade Mikulak accueillait les Championnats de France Elite d’athlétisme. À la maison, Amandine Brossier, Lisa Guillard, Ludivine Aubert ou encore Tristan Desprès ont connu des fortunes diverses. De l’hommage à Christophe Lemaitre à Renaud Lavillenie en passant par Sasha Zhoya et Louise Maraval, compte-rendu sur place de trois jours exceptionnels.
Texte: Renaud Chevalier
Photos: Franck Potvin, Théo Bariller-Krine et CaptureMySport/FFA
Trois jours d’émotions. Trois jours de frissons. Trois jours de passion. Ces championnats de France Elite d’athlétisme ont tenu toutes leurs promesses. Depuis vendredi 17 h 30 avec la finale homme du javelot, les concours n’ont cessé de s’enchaîner. Saut en longueur, saut en hauteur, 100 m, 3000 m steeple et bien d’autres… pour le plus grand plaisir des quelque 20 000 spectateurs (un record !) présents tout au long du week-end au stade Mikulak.
Un 4e sacre consécutif au goût amer pour Amandine Brossier
Elle le savait. Pour aller chercher une place en individuel sur 400m aux JO de Paris, Amandine Brossier devait passer sous la barre des 51 secondes (50’95’’ précisément). Alors que sa série envisageait le meilleur (51’33’’), les conditions météorologiques lui ont barré la route en finale. Pour son entrée en lice à 18 h 26 vendredi, l’Angevine n’a pas tremblé. Partie couloir 6, elle s’est imposée en 51’33’’ et a réalisé au passage le premier temps toutes séries confondues. La membre de la Team Angers Sport s’est rapprochée de son record personnel (51’21’’). En zone mixte, Amandine Brossier n’a pas caché sa détermination pour la finale. « Je suis vraiment déterminée pour demain (samedi à 19 h 30, N.D.L.R). L’objectif était de retrouver du plaisir par rapport aux week-end dernier compliqué (51’80’’ à Madrid le 21 juin, 53’09’’ à Genève le 22 juin, N.D.L.R). D’y aller à fond et ne pas couper son effort. » Ses 51’33’’ les rapproche des minima olympiques, placés à 50’95’’. « Évidemment que j’aurais bien aimé courir un tout petit peu plus vite. Après, ça me conforte sur mon niveau. J’ai déjà kiffé le public angevin. J’espère qu’ils seront encore plus nombreux demain». Une promesse tenue. La pluie en début d’après-midi n’a pas empêché le public de venir en masse supporter la pensionnaire du SCO Angers Athlétisme. En finale, elle devance Alex Deau et s’adjuge un quatrième titre consécutif historique de championne de France. Du jamais-vu. Mais avec un chrono en deçà de ses attentes et des minima olympiques : 52’08’’. « Réaliser les minima sur la dernière journée, ce n’est pas idéal. En tant qu’athlète, on a l’habitude de s’adapter. J’ai essayé de rester focalisée sur mes intentions. Le temps n’était pas forcément avec nous. L’objectif n’était pas d’aller chercher le titre. Bien sur que c’était important. J’avais dit que si je remportais le titre mais que je ne repartais pas avec les minima, ce serait un échec. Et bien c’est un échec. Je pense que je ne réalise pas encore. C’est vraiment une grosse déception. Mon plan de course était de partir fort. Le couloir 5 est un chiffre que j’aime bien. Je voulais vraiment m’aider des filles à l’extérieure. Je pense l’avoir bien fait. Je me sentais vraiment bien. Je sens que les 50 secondes sont à ma portée. Je ne sais pas trop ce qui me manque. J’ai essayé de m’accrocher au maximum. J’aurais bien aimé leur (le public) donner une meilleure récompense. Au ranking (autre modalité pour accéder aux JO, N.D.L.R), je suis loin. Le chrono ne va pas me permettre de rentrer des points. Faut le dire, c’est nul ». Un titre au goût amer donc mais Amandine devrait malgré tout participer aux Jeux de Paris avec les relais du 4×400 mixte et féminin (sélection officielle d’ici le 8 juillet).
Lisa Guillard, un record personnel et départemental !
Mardi le baccalauréat. Vendredi les championnats de France. Un agenda surchargé qui n’a pas semblé déstabiliser Lisa Guillard, notre lauréate Performance 2023. Pour la dernière épreuve de la première journée, la marcheuse de l’Entente Angevine Athlétisme s’est élancée vers 20 h 50. La junior a bouclé 10 000 mètres en 49 minutes et 32 secondes, terminant 12e. Un très bon temps. « Je ne pensais pas faire mon record (elle le bat de 15 secondes, N.D.L.R). C’était dur, j’étais entre deux groupes au début. Le groupe de devant allait trop vite pour moi, mais même en craquant après, je fais quand même mon record. Ça montre que ça allait vraiment vite. J’essayais de m’accrocher. Un moment, je suivais une autre coureuse mais je sentais que c’était un peu en dessous de mon rythme. Mais ça m’a permis de reprendre un peu après les tours rapides. J’ai relancé et ça l’a fait. C’est une bonne préparation pour les championnats de France junior (du 19 au 21 juillet à Albi, N.D.L.R). » Des « Allez Lisa », « Allez Lisa » ont fusé pendant toute la course. Benjamin, Thomas, Léo et Romain donnaient de la voix à chaque tour de piste. « C’était vraiment énorme. Je ne pensais pas qu’il y aurait autant de monde. Tout le long de la piste, j’entendais mon prénom. Ça m’a bien aidé », a apprécié Lisa. Romain, le plus jeune des quatre, se dirige vers le demi-fond. « On supporte notre club. C’est super de voir Lisa ici. Ça veut dire que l’Entente Angevine Athlétisme se porte bien. On espère qu’elle sera championne de France parce qu’elle n’est encore que junior. C’est vraiment intéressant. » Le futur de Lisa est tout autre : « La suite est de refaire une saison sur 10 km. M’habituer à la distance. Le 20 km va arriver vite. L’objectif est de faire encore mieux l’année prochaine. » Se qualifier pour les Jeux Olympiques sur 20 km marche est « un objectif » confie-t-elle. Des limites ? Elle ne s’en fixe aucune. « Mon rêve, c’est d’aller le plus loin possible. Je ne me fixe pas trop de barrières. On verra où ça me mènera. Le principal étant de garder du plaisir. Pour l’instant, je ne peux pas vous dire où je serai dans deux-trois ans. »
Ludivine Aubert et Tristan Desprès manquent le rendez-vous
Ces championnats de France n’ont en revanche pas réussi aux deux autres sociétaires de l’E2A. Ludivine Aubert a manqué sa série des 400m haies. La vice-championne du monde U20 à Nairobi en 2021 a conclu sa course en 61’39’’, soit près de trois secondes de plus que son record personnel (57’16’’). Huitième et dernière, elle ne verra donc pas la finale. « Franchement, je suis déçue. On avait quand même bossé des petits détails qui n’allaient pas. La semaine a été compliquée. Nous avons fini de peaufiner les derniers réglages il y a quelques jours seulement. Je n’ai pas été performante sur la fin de course. Ça amplifie encore mes défauts sur la gestion des haies. Il y a encore du travail à faire. Pourtant, je suis en forme. Je n’ai pas de blessures. Mon corps est plus vieux. J’ai quand même gagné en endurance, vitesse, force et en puissance. Ce n’est pas encore pour cette année. » Une place qui n’augure rien de bon pour la confiance. « C’est pesant mentalement, dans le sens où je travaille mais je ne vois toujours pas de résultats. Je reste optimiste. Le travail de ces deux dernières années, qui n’a pas été inutile, fera ses preuves l’an prochain. En tout cas, j’espère », disait-elle avec lucidité.
Auteur d’une belle progression cette saison, le perchiste Tristan Desprès avait pour ambition de frapper un grand coup dimanche. « J’aimerais vraiment battre mon record (5,62 m, N.D.L.R) », assurait l’Angevin à Ouest-France. Raté. Classé 10e, l’espoir a échoué à 5,45 m. Il s’est donc contenté d’un 5,30 m, loin de ses attentes. Un crève coeur pour celui qui visait très haut à domicile, mais il aura l’occasion de se racheter aux championnats de France junior dans deux semaines.
Les moments forts: l’hommage à Christophe Lemaitre
À 34 ans, l’Annécien a annoncé jeudi dernier prendre sa retraite sportive. Pour l’occasion, la Fédération Française d’Athlétisme et le public angevin lui ont rendu un vibrant hommage. Toute sa carrière a été retracé sur écran géant. « C’était un grand moment d’émotion. Je ne m’attendais pas à retrouver mes anciens camarades d’Aix-les-Bains. Je savais que j’allais vivre un moment particulier. Chaque athlète de haut niveau doit passer par là. » Champions de France à 20 reprises, Christophe Lemaitre dit donc au revoir aux pistes d’athlétisme.
Louise Maraval et Shana Grebo étincelantes
Elle avait quitté le Stadio Olimpico de Rome en argent. Elle repart d’Angers avec l’or. Presque à la maison, celle qui est originaire de La Verrie en Vendée a explosé le record des championnats en 53’71’’. Louise Maraval conforte sa très bonne forme du moment et s’installe définitivement comme l’une des favorites pour les JO sur 400m haies. Une autre surprise a enflammé le stade. La performance de Shana Grebo en 53’78’’, au coude à coude tout au long de la course avec Louise Maraval. Son exploit lui permet de s’offrir les minima olympiques, placés à 54’85’’ et surtout de faire le plein de confiance. Le 400m haies féminin tricolore a de belles années devant lui.
Renaud Lavillenie ne verra pas Paris
À l’instar d’Amandine Brossier, le rêve d’une quatrième olympiade pour Renaud Lavillenie passait par Angers. Pour se qualifier, il lui fallait atteindre les 5,82 m (minima olympiques). Un défi qu’il n’a pas su surmonter (trois échecs à 5,72m). « La journée était intense. Il y avait beaucoup d’enjeux. Le premier objectif était quoiqu’il arrive de sauter. On a tous été en galère avec le vent. C’est un sentiment de frustration de devoir tout jouer sur une compétition où on ne peut clairement pas s’exprimer. J’étais condamné à un exploit qui été au dessus de mes capacités du moment. » À 37 ans, le Charentais ne sera donc pas à Paris.
Sasha Zhoya, la preuve par trois !
L’étoile montante de l’athlétisme tricolore s’est fait peur en séries mais a assuré quelques minutes plus tard en finale pour parachever ces championnats de France. Le bloc saute au départ, Sasha Zhoya fait signe de la main mais les juges restent sceptiques. Contraint de continuer, la pépite voit ses concurrents prendre plusieurs mètres d’avance. Tel un champion, il s’accroche et finit deuxième de sa série, synonyme de qualification. Inespéré. En finale, le Clermontois a maitrisé son sujet, s’offrant un troisième titre consécutif sur 110 m haies. Sasha Zhoya prouve encore une fois qu’il n’est pas fait comme les autres. Place maintenant aux JO…